«Perpétuité» de Guillaume Poix : rondiers de nuit

Aube du roman. Par la porte d’entrée principale bleu vif, on voit Pierre arriver en Twingo prendre son service. Tenue de travail, Magnum aux pieds, il va pointer après avoir laissé son portable dans la boîte à gants. Laisse-t-on sa vie privée sur le trottoir ? Il ne sait que trop les dégâts occasionnés par ce simple lâcher. Mais c’est la règle. Sa silhouette semble traîner la patte. Moins d’élan qu’autrefois, «le monceau d’ennuis qu’il va falloir dompter tarit l’enthousiasme». Le premier surveillant s’engouffre dans la maison d’arrêt de Perpétuité le bien nommé, va à la relève, et joue comme un guide. «On a quoi ?» Une entrée d’écrou, à la veille d’un procès de deux mois aux assises. Du prévu mais du pénible. Un grain de sable qui va fragiliser l’équilibre. «Je vais passer chat noir, moi.» Dix agents vont épauler Pierre dans la surveillance nocturne. Onze uniformes contre une centaine de «matons» de jour, pour mille détenus. Précisément neuf cent cinquante pour six cent dix-sept places. Cinquante matelas au sol. «Une poudrière» a encore répété la directrice Bianca Mariani au préfet. Bienvenue dans la pénitentiaire, cadre peu riant, sujet casse-gueule.
Comment tisse-t-on du romanesque sur la vie derrière les barreaux ? Comment embarquer le lecteur avec des personnages d’une profession mal aimée ? De celle qui cohabite avec des monstres toute la journée. Comment infuse-t-on de la densité à un univers de procédures et de rôles ? L’immers
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